Je dédie cet article à ma plus jeune soeur, qui a visionné (et qui m’a fait visionner) ce film des dizaines, des centaines, des milliers de fois…
La Petite Sirène est l’un des films d’animation les plus réussis : Une magnifique histoire d’amour impossible, des chansons rythmées et une multitude de personnages tous plus attachants les uns que les autres.
Mais à bien y regarder, nous pouvons constater que la jeune Ariel est l’image même de l’enfant pris en otage par ses deux parents séparés. En effet, le personnage du père est bien stéréotypé : c’est l’homme fort, qui représente le pouvoir (c’est le roi Triton), l’autorité et l’interdit : c’est lui qui interdit à Ariel d’être en relation avec les hommes (= l’autre monde, qui représente, bien sûr, le sexe opposé).
La figure de la mère est un peu moins facile à décrypter ; mais nous pouvons affirmer qu’Ursula en est une image détournée : Elle précise notament qu’elle avait, à une époque, une place privilégiée au palais, place qu’elle semble avoir perdue à cause de son comportement : « de mon temps, on savait s’amuser, à l’époque où moi, je vivais au palais« , se lamente-t-elle ; et elle enchaîne : « et maintenant, regardez-moi… balayée de tous comme une vulgaire courtisane!« . A ces derniers mots, on peut comprendre qu’elle était la femme du roi Triton, et que son comportement quelque peu déplacé a provoqué leur rupture définitive.
De là à imaginer que la jeune Ariel est sa fille, il n’y a qu’un pas : voyez comme cette sorcière passe son temps à l’observer de loin, en silence.
On peu donc affirmer que l’histoire de La Petite Sirène symbolise le déchirement de deux adultes séparés, avec entre eux, les enfants, qui subissent : Ariel, en effet, semble être l’occasion pour Ursula de se venger du roi Triton (son ancien amant), figurant ainsi ce que de nombreux enfants vivent au sein de leur propre famille : Ursula se sert d’elle, de sa confiance, de son ignorance, dans le seul but de toucher le roi Triton ; Triton, quant à lui, est furieux de savoir que sa petite dernière a eu des relations avec cette femme détestée.
Nous pouvons aller plus loin dans cette analyse : Le roi Triton représente pour la jeune fille le père castrateur ; d’ailleurs tant qu’Ariel vit sous son toit, elle est « frustrée » par sa queue de poisson qui peut représenter une sorte de « ceinture de chasteté » rendant impossible pour elle toute sexualité. C’est auprès de la figure maternelle (Ursula), femme émancipée et sans complexe (voyez comme elle étale ses formes généreuses), qu’Ariel va pouvoir s’affranchir de l’interdit posé sur le sexe : c’est Ursula qui lui permet d’avoir des jambes (attribut suprème de la féminité), et c’est en s’éloignant de la maison du père, en fugant, même, qu’elle va pouvoir rencontrer l’amour. La preuve en est : pour pouvoir vivre pleinement son amour, même avec la bénédiction de son père, elle sera forcée de garder ses jolies jambes et de faire une croix définitive sur sa queue de poisson.
Une fois encore, nous pouvons constater à quel point les films d’animation traitent de sujets en rapport direct avec les grandes problématiques de notre société : la figure du père y est, certes, quelque peu stéréotypée, mais elle reflète bien l’image fondamentale que nous en avons. De même, la figure d’émancipation sexuelle, représentée par une femme (Ursula), reflète la symbolique diabolisée (lointainement issue de notre culture religieuse… ) que notre société met encore aujourd’hui sur la sexualité de nos jeunes filles.
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